L'art de rédiger une clause d'objectif

Une clause du contrat de travail peut prévoir que la rémunération du salarié varie en fonction de la réalisation d’objectifs ou de quotas préalablement déterminés.

Il s’agit alors d’une « clause d’objectif » ou « clause de quotas », souvent utilisée dans le secteur commercial. Pour être valable, la clause d’objectif doit remplir les conditions suivantes :

  • Les objectifs doivent être raisonnables et compatibles avec le marché
  • Les objectifs peuvent être définis par accord des parties ou unilatéralement par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction
  • En cas de non-réalisation des objectifs, il appartient au juge de rechercher si les objectifs ou quota fixés sont réalistes

Les objectifs fixés devant être réalisables et compatibles avec le marché, il arrive régulièrement que ceux-ci doivent être modifiés.

Le piège à éviter

Le piège est de prévoir, dans le contrat de travail, que les objectifs seront fixés d'un commun accord entre l'employeur et le salarié.

En effet, si cette clause emporte l'obligation pour l'employeur de proposer de nouveaux objectifs au salarié, en cas de refus par ce dernier des nouveaux objectifs, il y aura un blocage !

Dans une telle situation, le piège se referme sur l’employeur, qui ne pourra pas refuser de verser la rémunération variable prévue au contrat, au motif qu'aucun accord n'est intervenu entre les parties pour fixer les objectifs sur lesquels elle est assise.

Pire, en cas de désaccord persistant, il incombera alors aux seuls juges du fond de fixer les objectifs, et donc, la rémunération variable en fonction des critères visés au contrat et des accords conclus les années précédentes.

La solution : une bonne rédaction de la clause d'objectif

C’est pourquoi la rédaction d’une clause d’objectif requiert la plus grande prudence.

La préconisation est de prévoir une clause où l’employeur révisera les objectifs fixés, sans avoir à obtenir l'accord exprès du salarié, donc unilatéralement. Sous réserve que lesdits objectifs, ainsi fixés unilatéralement, soient réalistes et atteignables, la Cour de cassation a validé la rédaction d’une telle clause (2 mars 2011 n° 08-44.977).

C’est ce principe que la Cour de cassation a rappelé dans un arrêt de la chambre sociale en date du 9 mars 2022 n° 20-22.235.

En l’espèce, la rémunération du salarié était composée d'une part fixe et de commissions.

En vertu de son contrat de travail, les principes et modalités de la partie variable étaient définis dans le cadre du plan de rémunération, dont les modalités précises étaient portées à la connaissance de chaque commercial régulièrement par note de la hiérarchie.

Un document, dénommé manuel de commissionnement, complétait le plan de rémunération variable fixant les modalités de calcul et de versement des commissions. Ce même manuel de commissionnement pouvait donc modifier les objectifs fixés par la clause.

Le salarié reprochait à son employeur d’avoir réduit le taux de commissionnement sans son accord, ce qui constituait une modification de son contrat de travail, qu’il n’avait pas accepté. Il sollicitait un rappel de commissions devant les juges qui n'ont pas fait droit à sa demande.

La Cour de cassation rappelle le principe suivant :

« Lorsque les objectifs sont définis unilatéralement par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, celui-ci peut les modifier dès lors qu'ils sont réalisables et qu'ils ont été portés à la connaissance du salarié en début d'exercice. »

En effet, la Haute Juridiction considère que le manuel de commissionnement était opposable au salarié et que la réduction opérée par l'employeur, en raison des conditions de prix consenties au client et des décotes, était justifiée.

Préconisations

L’enseignement à retenir de cet arrêt est qu’il faut porter une grande importance à la rédaction de vos contrats de travail et plus particulièrement à la clause d’objectif pour vos commerciaux.

Outre de prévoir la fixation unilatérale des objectifs, il faut veiller à adresser à chaque commercial ses nouveaux objectifs, à la date fixée au contrat de travail.

Dans ce même courrier, il faut faire un point de l’année écoulée en termes de résultats et si ces deniers ne sont pas satisfaisants, rappeler à l’ordre le salarié, en mettant en avant ses défaillances ou manquements dans ses actions commerciales.

Ainsi, vous aurez des éléments pour motiver un éventuel licenciement pour insuffisance professionnelle.